Décryptage : la performance du gouvernement américain sur la transparence des accords internationaux

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Sommaire

En dĂ©cembre 2022, le Congrès amĂ©ricain a adoptĂ© des rĂ©formes majeures concernant la transparence des accords exĂ©cutifs, mises en Ĺ“uvre en septembre 2023. Six mois après l’entrĂ©e en vigueur de ces nouvelles mesures, nous Ă©valuons l’efficacitĂ© de ce nouveau système de transparence basĂ© sur les informations disponibles publiquement. Comme nous l’expliquerons, la loi a permis une transparence accrue de ces accords, conformĂ©ment aux intentions du Congrès. Cependant, certaines questions subsistent quant Ă  la conformitĂ© de l’exĂ©cutif, et d’autres aspects du nouveau rĂ©gime de transparence peuvent ĂŞtre amĂ©liorĂ©s. Comme le savait le Congrès lors de l’adoption de la loi, le travail ne s’arrĂŞte pas lĂ .

Le cadre de la loi Case-Zablocki

Depuis la Seconde Guerre mondiale, la majoritĂ© des accords internationaux conclus par les États-Unis ont Ă©tĂ© des « accords exĂ©cutifs » plutĂ´t que des traitĂ©s approuvĂ©s par le SĂ©nat. Nombre de ces accords exĂ©cutifs sont autorisĂ©s ou approuvĂ©s par des lois (les « accords exĂ©cutifs lĂ©gislatifs »), tandis que d’autres sont conclus sur la base de l’autoritĂ© confĂ©rĂ©e par des traitĂ©s (les « accords exĂ©cutifs basĂ©s sur des traitĂ©s ») ou sur l’autoritĂ© constitutionnelle indĂ©pendante du PrĂ©sident (les « accords exĂ©cutifs exclusifs »).

La loi Case-Zablocki, promulguĂ©e pour la première fois en 1972, exige que le DĂ©partement d’État rapporte ces accords exĂ©cutifs au Congrès. Jusqu’Ă  rĂ©cemment, la loi obligeait Ă  rapporter ces accords dans les 60 jours suivant leur entrĂ©e en vigueur. Une autre loi connexe exigeait depuis longtemps la publication des accords sur un site web du DĂ©partement d’État dans les 180 jours suivant leur entrĂ©e en vigueur.

Cependant, la communication des accords par le DĂ©partement d’État a souvent Ă©tĂ© tardive ou incomplète, et le Congrès a modifiĂ© la loi Case-Zablocki Ă  plusieurs reprises pour amĂ©liorer la conformitĂ© sans grand succès. Au fil du temps, les rĂ©glementations du DĂ©partement d’État ont exemptĂ© de nombreuses catĂ©gories d’accords de la publication, privant ainsi le public d’informations sur ce qui Ă©tait rapportĂ© au Congrès. De plus, bien que les rapports au Congrès incluent un bref exposĂ© de la base lĂ©gale des accords, ces informations n’étaient pas rendues publiques.

En outre, ni la loi Case-Zablocki ni la loi sur la publication ne couvraient les accords non contraignants conclus par l’exécutif, même si ces accords, de plus en plus nombreux, ressemblent souvent à des accords exécutifs contraignants en forme et en substance. Nous avons discuté de certaines de ces lacunes en termes de transparence dans un article de revue juridique publié en 2020. Plus récemment, nous avons publié un autre article traitant de l’utilisation croissante des accords non contraignants par l’exécutif, y compris par diverses agences administratives.

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Amendements récents

En dĂ©cembre 2022, le Congrès a amendĂ© la loi Case-Zablocki pour imposer de nouvelles exigences de transparence significatives pour les accords exĂ©cutifs et certains accords non contraignants. La loi rĂ©visĂ©e oblige dĂ©sormais le DĂ©partement d’État Ă  transmettre les accords exĂ©cutifs au Congrès sur une base mensuelle. En outre, le DĂ©partement doit transmettre au Congrès les « instruments non contraignants qualifiĂ©s », dĂ©finis comme des instruments non contraignants qui « pourraient raisonnablement avoir un impact significatif sur la politique Ă©trangère des États-Unis » ou qui sont soumis Ă  une communication Ă©crite du prĂ©sident ou du membre en chef de la commission des affaires Ă©trangères du Congrès.

Pour les accords exĂ©cutifs et les instruments non contraignants qualifiĂ©s, l’exĂ©cutif doit inclure une « description dĂ©taillĂ©e » de la base lĂ©gale soutenant l’accord ou l’instrument. Lorsque le soutien lĂ©gal repose sur l’Article II de la Constitution, l’exĂ©cutif doit expliquer sa base pour s’y rĂ©fĂ©rer. Les rĂ©visions Ă  la loi exigent Ă©galement la publication de la plupart des Ă©lĂ©ments devant ĂŞtre rapportĂ©s au Congrès, y compris les descriptions de la base lĂ©gale. Ces changements ont pris effet en septembre 2023, et le DĂ©partement d’État a mis en Ĺ“uvre des règlements en octobre suivant. Les règlements incluent, entre autres, une liste de critères que l’exĂ©cutif doit considĂ©rer pour dĂ©terminer si un instrument non contraignant est susceptible d’avoir un impact significatif sur la politique Ă©trangère des États-Unis.

Réformes de la transparence impulsées par la loi

Après six mois de rapports et de publications, nous pouvons commencer à évaluer la conformité de l’exécutif avec la nouvelle loi. Des améliorations substantielles et importantes ont été réalisées, avec toutefois quelques déceptions.

Organisation gouvernementale

Le gouvernement a visiblement rĂ©organisĂ© ses structures pour mieux rĂ©pondre aux objectifs de transparence et de responsabilitĂ© de la nouvelle lĂ©gislation. Le DĂ©partement d’État a publiĂ© des rĂ©glementations mises Ă  jour conformĂ©ment Ă  la loi et s’est engagĂ© avec les dizaines d’agences concluant des accords contraignants et non contraignants pour s’assurer qu’elles sont informĂ©es des nouvelles exigences. Le SecrĂ©taire d’État a nommĂ© un responsable en chef des accords internationaux, comme l’exige la loi rĂ©visĂ©e. Le DĂ©partement de la DĂ©fense a Ă©galement dĂ©signĂ© son propre responsable en chef des accords internationaux, comme requis. D’autres agences progressent Ă©galement sur cette exigence. Cette amĂ©lioration structurelle est cruciale, assurant qu’il y a des personnes responsables de la conformitĂ© avec la nouvelle loi, ainsi que des obligations de rapport prĂ©existantes.

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Publication des accords exécutifs contraignants

Le DĂ©partement d’État a nettement amĂ©liorĂ© la transparence publique des accords exĂ©cutifs. Depuis octobre 2023, il publie sur un site web les informations rapportĂ©es mensuellement au Congrès concernant les accords exĂ©cutifs. (Le texte rĂ©el des accords se trouve malheureusement sur un site web diffĂ©rent.) Entre octobre 2023 et mars 2024, le DĂ©partement a rapportĂ© 36 accords exĂ©cutifs ainsi que la base lĂ©gale de ces accords en termes de rĂ©fĂ©rences sans explication supplĂ©mentaire.

Ce site web constitue une amĂ©lioration majeure en matière de responsabilisation des accords internationaux. Par le passĂ©, le gouvernement ne publiait environ que la moitiĂ© de ses accords exĂ©cutifs contraignants. L’accès public Ă  l’autre moitiĂ© dĂ©pendait de sources privĂ©es disponibles uniquement sur abonnement payant. De manière tout aussi importante, la base lĂ©gale de chaque accord est maintenant publiĂ©e, comme l’exige la nouvelle loi. Cette base lĂ©gale, qui est gĂ©nĂ©ralement constituĂ©e de lois mais pas toujours, Ă©tait auparavant transmise au Congrès mais n’était pas rendue publique. ConformĂ©ment Ă  la nouvelle loi, les rĂ©fĂ©rences sont Ă©galement plus prĂ©cises qu’auparavant, indiquant la section spĂ©cifique d’une loi sur laquelle l’exĂ©cutif s’appuie.

Ces changements sont importants pour plusieurs raisons. Ils permettent au public de savoir quels accords exĂ©cutifs le gouvernement conclut en son nom. Ils permettent Ă©galement une surveillance beaucoup plus large de la lĂ©galitĂ© des accords exĂ©cutifs contraignants. Notre travail antĂ©rieur a fourni des raisons empiriques et conceptuelles de penser que de nombreux accords exĂ©cutifs manquent d’une base lĂ©gale solide, mais a notĂ© qu’il Ă©tait difficile — en raison de contraintes de ressources et de rĂ©fĂ©rences lĂ©gales imprĂ©cises — pour les commissions parlementaires concernĂ©es de scruter la lĂ©galitĂ© des accords. Les rĂ©fĂ©rences quelque peu plus dĂ©taillĂ©es, et en particulier leur disponibilitĂ© au public, devraient thĂ©oriquement permettre aux universitaires et autres experts d’Ă©valuer et de critiquer l’exĂ©cutif de manière plus approfondie.

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DĂ©fis restants et perspectives d’amĂ©lioration

Malgré ces avancées significatives, il reste des domaines à améliorer. Par exemple, le délai de publication des accords non contraignants et leur portée sont des aspects qui nécessitent une attention accrue. Un autre point à surveiller sera la qualité et la clarté des descriptions légales fournies pour chaque accord. Une surveillance constante et des ajustements réguliers seront nécessaires pour garantir que la loi atteint pleinement ses objectifs de transparence et de responsabilisation.

La rĂ©vision de la loi Case-Zablocki marque un pas en avant pour la transparence des accords internationaux conclus par les États-Unis. En six mois, des progrès notables ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s, bien que des dĂ©fis persistent. Le gouvernement doit continuer Ă  affiner ses pratiques pour assurer une transparence complète et efficace, permettant ainsi au public et aux experts de surveiller et d’analyser ces accords. La route est encore longue, mais les fondations sont posĂ©es pour un avenir plus transparent et responsable.

En rĂ©sumĂ©, le parcours de la transparence des accords internationaux par le gouvernement amĂ©ricain est entamĂ©. Cette avancĂ©e est cruciale pour la dĂ©mocratie et la responsabilitĂ©, et elle nĂ©cessite notre vigilance continue pour s’assurer qu’elle reste sur la bonne voie.

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