C’est une rentrée scolaire qui fait grand bruit en Algérie. Pour cause, une décision inattendue a été prise par les autorités éducatives : les écoles privées n’ont plus le droit d’enseigner en français. C’est une surprise de taille qui rompt avec des décennies de pratique et annonce un changement de cap dans la politique linguistique du pays.
Une rupture avec le passé
Cette décision marque une rupture significative avec le passé. En effet, l’ancien président algérien, Abdelaziz Bouteflika, avait un penchant pour la langue française. Adepte des discours en français, il avait même assisté au sommet de la Francophonie sans que l’Algérie n’en soit membre. Il avait surtout bloqué la loi sur la généralisation de la langue nationale, autrement dit, l’arabisation.
A l’inverse, son successeur, le président Tebboune, semble déterminé à prendre le contre-pied de cette politique. Il impose ainsi l’apprentissage de l’anglais dès le CM2 et dans l’enseignement supérieur. Une décision qui renoue avec la politique de l’Algérie officielle depuis l’indépendance : celle d’éradiquer le français.
Le français, un héritage controversé
En Algérie, la langue française est un héritage controversé. Perçue comme le reliquat de la colonisation par certains, elle est rejetée avec véhémence par les islamistes, les nationalistes puristes et les tenants du panarabisme. Pour eux, ceux qui parlent français sont du « Parti de la France » et cela suffit à les discréditer.
L’interdiction de l’enseignement en français n’est que l’expression la plus récente de ce rejet. Elle s’inscrit dans la lignée de plusieurs mesures visant à minimiser l’influence française en Algérie, comme l’annulation de la visite officielle à Paris ou les controverses au Sahel.
La persévérance des francophones
Malgré ce climat hostile, un tiers des Algériens continue de lire, d’écrire et de parler en français. Ils voient dans cette langue un atout pour venir s’installer en France. Or, ils se trompent. En effet, il n’y a pas d’examen de français à la frontière.
L’Algérie reste cependant le 3ème pays francophone, après le Congo Kinshasa.
La Francophonie, une cause perdue ?
Au-delà de l’Algérie, c’est la Francophonie dans son ensemble qui semble être en péril. En France, la défense du français est souvent perçue comme un combat d’arrière-garde.
Pourtant, l’Algérie n’a pas, comme la France, une carte d’identité rédigée en anglais, ni 1300 formations universitaires uniquement en anglais. Paradoxalement, les pouvoirs publics français créent la « French Tech », « Choose France », « French Impact », « HS Data Hub », etc., autant de termes anglophones approuvés par le Conseil d’Etat.
De plus, Emmanuel Macron a fait élire et réélire une ministre rwandaise pour diriger l’Organisation internationale de la Francophonie. Une décision controversée, étant donné que le Rwanda a interdit l’usage du français à son peuple et imposé l’enseignement en anglais.
Vers une renaissance de la Francophonie ?
Malgré ces obstacles, la Francophonie n’est pas encore morte. La Cité internationale de la Francophonie ouvrira ses portes dans trois semaines, dans le château de Villers-Cotterêts, où François Ier a imposé le français dans tous les actes administratifs. Un symbole fort qui pourrait donner un nouvel élan à la Francophonie.
Cependant, il est crucial que la France se réapproprie sa langue et la valorise, que ce soit dans sa politique étrangère ou même dans la délivrance des visas. A défaut, Villers-Cotterêts risque de devenir un monument funéraire à la mémoire d’une Francophonie en déclin.
L’avenir de la Francophonie en Algérie et ailleurs est donc entre les mains des décideurs politiques. Espérons qu’ils sauront faire les bons choix pour valoriser cette riche langue et culture partagées par des millions de personnes à travers le monde.
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